Aller plus loin avec le Parti Ouvrier Indépendant



Le site du comité de Saint-Quentin s’est présenté d’emblée comme un « espace de réflexion et de débat », dans la perspective de la reconquête du terrain idéologique perdu par la gauche. Il nous a semblé en effet que la formule de Marx « l’idéologie dominante est l’idéologie de la classe dominante » était toujours d’actualité et que le combat idéologique avait toujours sa place dans la lutte de classe. Il nous a semblé aussi que ce combat idéologique avait tout à gagner de la libre discussion entre les militants, non seulement les militants du POI, mais encore les autres militants du mouvement ouvrier ; plus encore qu’il serait opportun de l’enrichir en l’ouvrant au plus grand nombre possible. Nous avons coutume de nous adresser aux camarades et aux militants ; les hommes politiques en campagne s’adressent aux Français ; nous avons ici l’ambition de nous adresser à la population, bref aux « gens » !

  • C’est là une manière de ne pas sombrer dans le sommeil dogmatique de « l’entre-soi », de préciser et d’approfondir nos réflexions en les mettant à l’épreuve des objections.
  • Nous avons tout avantage, si nous voulons rallier des militants, à pouvoir répondre aux questions que l’on nous pose sur nous-mêmes, et donc de nous les poser à nous-mêmes.
  • On peut espérer qu’un tel débat, s’il parvient à s’instaurer, contribue à briser quelques rigidités qui font obstacle au développement du POI. Je suis ici très allusif, espérant que c’est le débat lui-même qui aidera à préciser lesquelles.

Si, encore une fois, un tel débat peut s’instaurer, aller plus loin avec le POI, ce serait aider le POI à aller plus loin.

Tous les partis de gauche présentent un candidat aux présidentielles 2012 et un programme, encore dit projet, plus ou moins étoffé, dans le cadre de cette campagne. Le POI, dès lors qu’il est le seul parti de gauche à n’avoir pas présenté de candidat, peut-il néanmoins prendre sa place sur la tribune des présidentielles, ne serait-ce qu’en faisant campagne pour expliquer les raisons de sa non candidature ; de ne pas présenter de candidat dispense-t-il d’exposer un "programme de gouvernement" ; y a-t-il lieu de présenter un « projet de société » (avec toutes les réserves qu’il y a lieu d’apporter à ces expressions) ?

Aujourd’hui, je constate, une fois de plus, que le POI n’existe pas dans (et pour) les médias, et rien n’assure qu’il existerait davantage s’il avait présenté un candidat aux présidentielles. Les lettres adressées par Daniel Gluckstein et Gérard Schivardi au président du Conseil national de l’audiovisuel en février 2009 montrent qu’il y a là un vrai problème, qui n’a pu jusqu’à présent être résolu.

On objectera qu’il n’est pas indispensable d’exister dans (et pour) les médias pour exister, et pour peser sur les événements. Ce serait d’autant plus vrai pour un parti qui ne situe pas tant son action sur le terrain électoral que sur celui de la lutte de classe. Le POI entend exister et peser par son action militante, par la mobilisation et l’organisation du mouvement ouvrier, dans la diversité de ses composantes. On dira aussi que près de 8000 militants et un journal tel qu’Informations Ouvrières, ce n’est pas rien, et que le POI n'a pas à rougir de la comparaison avec d’autres partis ouvriers, pourtant bien mieux relayés que lui par les médias. Bref, on peut penser qu’il vaut mieux « ne pas exister » comme le POI, qu’« exister » comme le NPA, dont le candidat Philippe Poutou, pour paraître sur le devant de la scène, s’est fait malmener par Ruquier et ses acolytes dans une émission grand public peu propice au débat politique dont une autre émission « arrêt sur image » « rend compte » par la bouche de l’humoriste Didier Porte (c’est dire !) La question mérite d’être posée : jusqu’où peut-on aller pour être connu ?


Philippe Poutou chez Ruquier : le piège.

Le POI n’a envoyé aucun de ses militants ou de ses dirigeants se sacrifier sur l’autel médiatique. Il reste que s’il est une leçon à tirer de la malheureuse prestation de Poutou sur le plateau de Ruquier, c’est que l’on ne saurait répondre aux questions des journalistes et aux railleries des « humoristes » par des généralités et des slogans. Mais c’est également vrai pour la population en général qui attend que l'on apporte des réponses aux questions qui sont posées dans les médias, et dans les termes où elles sont formulées par les journalistes, quelle que soit par ailleurs leur pertinence.

C’est à ce niveau que s’engage le combat idéologique : à nous de faire évoluer le questionnement, mais nous ne pourrons éviter des questions sur la personnalité de nos « dirigeants », sur notre « programme » ou notre « projet », et c’est dans ce cadre prédéfini que nous serons amenés à nous expliquer sur la rupture avec l’Union européenne, l’annulation de la dette, la convocation d’une constituante bref, ce qui nous démarque de tous les autres partis, tout en sachant que :

  1. Si beaucoup pensent que la dette n’est pas celle des peuples, à fortiori celle des classes laborieuses, beaucoup sont néanmoins persuadés qu’une annulation est impossible, voire illégitime : on nous oppose fréquemment que si les particuliers sont bien obligés de rembourser leurs dettes, il doit en être de même des États. On peut voir là l’effet du matraquage médiatique visant à persuader que, comme l’indique un sondage IFOP pour Dimanche Ouest-France, la dette et les déficits publics seraient devenus les priorités des Français » :
    « À la question "quel est le problème qui vous paraît le plus important aujourd'hui pour la France ?", 33% des personnes interrogées citent la dette et les déficits publics, 23% mentionnent le pouvoir d'achat, 23% l'emploi et 8% l'emploi des jeunes. Les retraites, tout comme l'éducation et la recherche, ne sont mentionnées que par 4% des Français, devant la sécurité des personnes et des biens (3%) et l'environnement (2%). »
    Un telle sondage fait bien sûr partie de la vaste campagne d’intoxication et de manipulation de l’opinion ; il ne doit pourtant pas être ignoré.
  2. Si beaucoup aperçoivent de plus en plus nettement les écueils de la construction européenne et ses conséquences dramatiques pour les peuples d’Europe, la rupture avec l’Union européenne et ses institutions, la remise en question des traités qui la fondent (De Maastricht à Lisbonne), l’abandon de l’Euro auxquels appelle le POI sont souvent perçus comme excessifs et irréalistes. C’est également l’effet du conditionnement médiatique, mais la construction européenne, quels que soient ses aspects négatifs, est bien souvent perçue comme irréversible et l’idée d’une Europe protectrice n’a pas été totalement battue en brèche par la crise de la zone euro, à tel point que l’éclatement possible de cette zone est encore craint par certains comme un désastre. Il ne faut pas négliger cette idée couramment admise qu’une union des peuples européens permettrait de surmonter les égoïsmes des nations et leurs pulsions guerrières, que la « voix des nations », c’est « la voix du sang », comme le chantait Brel. Il ne faut pas oublier que l’idée européenne plonge aussi ses racines dans une tradition antimilitariste et pacifiste que l’on peut juger tout à fait respectable. Si l’on ajoute à cela qu’hormis le POI, il n’y a que le Front national qui prône une rupture avec l’Europe et la sortie de l’euro, on comprend mieux pourquoi il faut être très prudent et « pédagogue » avec ce mot d’ordre.
  3. La question de l’assemblée constituante, dont nous faisons l’objectif de notre action politique et le point de départ d’un processus démocratique est loin d’aller de soi pour la plupart des gens et même pour d’autres organisations qui en font mention (par exemple le Front de gauche qui, dans son programme, appelle à la convocation de l’assemblée constituante de la VIe République). Mais nous-mêmes, sommes-nous capables de nous expliquer là-dessus ?
    Nous trouvons bien, dans l’adresse du congrès extraordinaire du 2 octobre 2011 la mention suivante :
    « Partisan de restaurer le suffrage universel dans toute sa signification démocratique, le Parti ouvrier indépendant se prononce pour l’élection d’une Assemblée constituante souveraine composée de délégués élus, mandatés et révocables concentrant entre leurs mains le pouvoir d’édifier des institutions libres et souveraines capables de briser la dictature de la troïka.
    Seul un gouvernement appuyé sur une telle Constituante souveraine disposera des moyens de prendre les mesures d’urgence et de sauvegarde du peuple travailleur et de la jeunesse. ».

    Fort bien, mais cela ne dit rien des modalités de cette élection, ni de ce qui pourrait la rendre possible si l’on voit bien ce qui pourrait la rendre nécessaire. En outre, pour autant qu’une telle assemblée soit en mesure de prendre les mesures d’urgence indispensables dans une situation à l’évidence catastrophique, cela ne dit rien des perspectives qui pourraient être les siennes après avoir édifié des institutions libres et souveraines et brisé la dictature de la troïka.
    Le 3ème congrès du POI avait indiqué de manière claire que la mise à bas des institutions de la Ve République était la condition indispensable d’une « reconquête de la démocratie dont le peuple définira lui-même la forme et le contenu »
    Soit, mais l’on doit bien avoir une idée de cette « forme » et de ce « contenu » !
    D'ailleurs le 3ème congrès précise qu’un « gouvernement porté au pouvoir par la mobilisation des masses et appuyé sur une Assemblée constituante pourrait :
  • entreprendre la nationalisation, sans indemnité ni rachat, de l’ensemble du système bancaire (et la confiscation des gigantesques profits des banquiers et des spéculateurs),
  • effacer cette dette créée pour les besoins des spéculateurs et dégager ainsi les moyens mis au service d’une politique de défense de l’emploi, de l’industrie, des services publics, et non de la spéculation et de l’exploitation,
  • soustraire les leviers de l’économie à la classe capitaliste et à ses instruments que sont le Fonds monétaire international, la Banque mondiale, l’Union européenne, la Banque centrale européenne,
  • interdire les licenciements,
  • nationaliser les secteurs clés de l’économie,
  • faire prévaloir le droit de toute la jeune génération à un vrai travail, un vrai salaire, un vrai diplôme.
Voilà donc les éléments d’un programme qu’une république véritable issue d’une assemblée constituante aurait en charge.
Fort bien, mais il faut aller plus loi et discuter de ce programme tracé dans les grandes lignes afin de :
  • le préciser et de l’étoffer autant que possible, sans tomber dans une construction utopique,
  • en monter la cohérence et la faisabilité
  • en questionner les modalités de réalisation et les étapes,
… sans oublier qu’il s’agit de « communiquer » et que, dans le cadre de cette communication, nous aurons à répondre à des questions telles que :

Vous dites non à tout : à l’Europe et aux marchés, mais que mettez-vous à la place ?

Vous refusez toute mesure pour surmonter la « crise de la dette » et combler les déficits ; vous prétendez qu’il est possible d’annuler la dette purement et simplement, mais comment ferez-vous tourner l’économie et comment paierez-vous les fonctionnaires lorsque vous aurez fermé le robinet des marchés ?

Voulez-vous la révolution ou des réformes ? Quel est votre dessein : l'abolition de la propriété privée des moyens de production, la "démondialisation" ? Quel régime politique et économique voulez-vous mettre en place : le communisme, le socialisme ? Et quel modèle de société ?

Etc.

Je ne dis pas que ce soient toujours de bonnes questions, mais qui peut prétendre qu’elles ne lui ont jamais été posées, sous cette forme ou sous une autre ? C’est pourquoi nous devons être en état soit d’y répondre, soit de montrer en quoi elles ne sont pas bonnes, et dans un cas comme dans l’autre, de convaincre. Pour cela nous devons nous les poser. Il ne suffira pas de renvoyer les questionneurs à nos tracts ou à Informations ouvrières.

C’est un nouveau front dans le domaine de la communication et sur le terrain de la lutte idéologique de classe que je propose d’ouvrir sur ce site, en invitant à un débat ouvert sur toutes les questions tournant autour de nos perspectives, de notre programme politique et … de notre communication.


En pratique :

Pour participer au débat, il suffit de donner un avis sur cet appel en enregistrant un commentaire au bas de l' article : je rappelle qu’il est possible de le faire en son nom propre et ès qualités ou anonymement, ce qui importe le plus n'étant pas qui le dit, mais ce qui est dit. Ces commentaires, tout en étant maintenus dans leur intégralité à titre de commentaires, seront réintégrés au corps du texte, pour être confrontés, ce que chaque intervenant pourra vérifier, dont il sera juge, et qu’il pourra encore discuter. C’est en ce sens que le débat, s’il peut effectivement s’instaurer, sera libre et ouvert : il n'est requis pour y participer ni d'être militant du POI, ni d'être sympathisant, ni même d'en partager les positions.

Il est encore possible d'adresser au site un article, sous forme de document joint, à l'adresse électronique suivante, mais à la différence d'un commentaire, cet article devra être signé pour être porté sur le site et référencé.

Articles et commentaires sont attendus avec impatience et intérêt.














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